<strong>Débats contre la suspension d’un programme d’enseignement... Qu’en est-il arrivé?</strong>
Maryssa Kozlowskyj
En novembre dernier, des étudiants franco-ontariens faisant demande aux programmes supérieurs de l’École des sciences de l’éducation de l’Université Laurentienne ont été surpris de constater que leur programme d’étude voulu n’existait plus. Sans avertissement aux étudiants, le baccalauréat en éducation au cycle intermédiaire-supérieur (aussi connu sous le nom d’Option 3) a été mis en suspens, laissant plusieurs d’entre eux désemparés face à leur future carrière. Cette décision a été prise pour permettre aux membres de l’École des sciences de l’éducation le temps nécessaire de se pencher sur la problématique de l’offre du cycle intermédiaire-supérieur. Ce cycle, offert en français uniquement par l’École des sciences de l’éducation de la Laurentienne, permet de former des enseignants pour la 7e à la 12e année.
Suite à la mise en suspens du programme, l’indignation fut ressentie par le public lorsque Kaitlyn Brisebois, Josée Wahamaa et Emily Ménard, étudiantes francophones de l’Université Laurentienne ont fait appel aux médias dans le but d’infirmer la décision de l’Université. En entrevue avec Radio-Canada en novembre dernier, ces étudiantes ont fait valoir leur mécontentement en notant que la mise en suspens du programme est déroutante pour plusieurs étudiants souhaitant devenir enseignants au niveau secondaire. En voici un témoignage :
« J’ai contacté la doyenne de la faculté d’Éducation en fin septembre pour me renseigner sur le statut de l’option 3. Par contre, je n’ai pas été informé de l’annulation de l’option 3 jusqu’au 20 novembre. Étant donné que la date limite pour faire demande à l’école des sciences de l’éducation était le 1er décembre, ceci ne m’a pas donné amplement de temps pour planifier mes études en fonction de ce changement. Ce qui m’a surtout frustrée, c’était le fait que j’ai appris de l’annulation du programme à partir d’un article publié dans le Voyageur. Chaque personne à qui j’ai envoyé un courriel m’a dit qu’elle me tiendra au courant de la situation, ce qui n’est pas arrivé. Pour le moment, j’espère suivre l’option 2 l’an prochain. » - Kaitlyn Brisebois, étudiante de 4e année au baccalauréat.
À ce jour, l’Université Laurentienne reste ferme dans sa décision : elle ne restaurera pas le programme en question en septembre 2020. Toutefois, en guise de solution, Mme Lace Marie Brogden, Doyenne de la Faculté d’éducation, et M. Yves Pelletier, Vice-recteur associé aux études et affaires francophones, ont annoncé la création d’une bourse pour l’année 2020 qui « permettra aux étudiant.e.s ayant été qualifié.e.s à l'Option 3 au début de leur parcours de formation initiale d'acquérir, s'ils ou elles le désirent, un cours menant à une qualification de base additionnelle (QBA) au cycle supérieur offert par le Centre de perfectionnement académique de la Faculté d'éducation de l'Université Laurentienne » selon la Doyenne. Ce QBA est requis pour l’enseignement aux niveaux supérieurs. Cette nouvelle bourse pourrait apaiser les inquiétudes de certains étudiants et les appuyer pendant que l’École des sciences de l’éducation prenne position sur l’offre du cycle intermédiaire-supérieur.
Toutefois, cette bourse n’est pas une solution ultime au problème. Josée Wahamaa, une étudiante touchée par la suspension du cycle intermédiaire-supérieur, planifie suivre un cours menant à une qualification de base additionnelle (QBA) à la suite de l’obtention de son brevet en éducation afin d’enseigner dans les écoles secondaires. « Mais, le seul problème est que je n’aurai pas d’expérience en classe pour le secondaire pendant mes stages. »
Risque d’accentuer la pénurie d’enseignants
Le brevet en éducation au cycle supérieur est de toute importance, autant à l’échelle provinciale que nationale. Depuis quelques années en Ontario, grand nombre d’écoles primaires et secondaires vivent une pénurie d’enseignants francophones qualifiés sans précédent. Ces écoles font face non seulement à un problème persistant de recrutement, mais aussi à une difficulté de retenir des enseignants en poste. La chute des inscriptions aux programmes d’éducation des deux universités offrant ce brevet en Ontario est une des raisons au cœur de cette pénurie. Ces conclusions permettent de croire que la suspension ainsi que la possibilité d’annuler le cycle intermédiaire-supérieur en question risque d’aggraver la pénurie d’enseignants, notamment dans les écoles secondaires de langue française en Ontario et au Canada.