Étudier en français sans étudier… le français?

L’édifice Parker sur le campus de l’Université Laurentienne. Photo : Olivier Bonin-Ducharme

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La quasi-totalité du département d’Études françaises de l’Université Laurentienne a été victime des coupes effectuées en avril 2021.  De nombreuses questions sont soulevées par les membres de la communauté franco-ontarienne. Notamment : comment une université triculturelle et qui se proclame bilingue peut-elle affirmer qu’elle l’est sans avoir un département d’Études françaises? 

Le département d’Études françaises est un produit de base commun aux universités canadiennes et américaines. Par exemple, il existe un département d’études françaises à l’Université de Chicago, à l’Université Columbia, à l’Université de Berkeley en Californie et à l’Université Princeton, pour n’en nommer que quelques-unes.

Une importance négligée

Auparavant, le département des Études françaises de l’Université Laurentienne se chargeait des cours de linguistique, de français, de littérature francophone et de culture artistique franco-ontarienne. Le département livrait aussi le programme de français langue seconde (FSL), une opportunité pour les anglophones/allophones de perfectionner la langue de Molière et d’apprendre à connaitre la culture. 

Ali Reguigui.

Photo : Courtoisie

Pour Ali Reguigui, le seul membre de la faculté encore à l’emploi de l’Univerité, le département d’Études françaises était bien plus qu’un département académique : il contribuait à la vitalité francophone à Sudbury. Il le décrit comme étant «le cœur battant de la culture francophone dans toute la région, même de tout le Nord».

Il explique que le département a été un élément historique riche et influent à Sudbury, qui a aidé à fonder de nombreux autres organismes. Par exemple, le professeur mentionne que l’ancien département d’Études françaises de la Laurentienne fut étroitement lié à la fondation des institutions que l’on retrouve maintenant dans la Place des Arts du Grand Sudbury. 

Grandes conséquences

La professeure émérite Julie Boissonneault — qui a perdu son poste en avril 2021 — mentionne qu’elle manque le «va-et-vient constant» du département et le contact étroit qu’elle pouvait avoir avec ses collègues et étudiants. Mme Boissonneault a passé la majorité de sa carrière à la Laurentienne. 

Elle estime que les conséquences de la suppression de ce département sont trop nombreuses pour être comptées et ne se feront pas toutes sentir tout de suite. «Ils ont miné la relève, explique-t-elle. Les conséquences se feront sentir probablement plus tard, dans une génération.» 

Les deux professeurs s’inquiètent de ce que cela signifie pour l’offre et la qualité de l’éducation francophone dans le Nord de l’Ontario. «Ceux qui veulent avoir une formation en français vont s’en aller ailleurs et ceux qui restent sont menacés par l’assimilation», dit M. Reguigui. 

Après l’apocalypse, la désolation! - La dernière publication Facebook du Département des études françaises.

Il y aura un effet d’entrainement sur la francophonie à Sudbury. Le département d’Études françaises avait des partenariats importants avec de nombreux organismes francophones à Sudbury et ceux-ci offraient des stages pour les étudiants de la Laurentienne. En retour, professeurs et étudiants allaient voir  des pièces de théâtre, des films et des spectacles francophones. 

Sans stimulant pour les arts francophones dans la région, des lieux comme la Place des Arts pourraient avoir plus de difficultés à recruter de nouveaux talents à l’avenir. 

L’offre des programmes en français a été sévèrement coupée à la Laurentienne, suffisamment pour avoir enfreint la Loi sur les services en français de l’Ontario lorsqu’elle a coupé deux diplômes désignés. 

Si l’Université de Sudbury veut rouvrir pour offrir des programmes en français, c’est en partie pour participer au dynamisme de la francophonie sudburoise. 

Olivier Bonin-Ducharme

Olivier Bonin-Ducharme est le rédacteur en chef de l’Orignal déchaîné pour l’année scolaire 2022-2023. Il est inscrit dans sa deuxième année à l’Université Laurentienne dans le programme de Sociologie. Il est un avide joueur de curling, passionné des sciences humaines et amateur de la culture franco-ontarienne.

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